07 août 2010

Savoir-croire

" Il est essentiel que l'on ne se méprenne pas sur le rôle de la "conscience" : c'est notre relation avec le "monde extérieur" qui l'a développée. En revanche la direction, soit la surveillance et la prévoyance eu égard au jeu synthétique des fonctions corporelles ne parvient pas à notre conscience ; pas plus que l'emmagasinement intellectuel : qu'il existe pour cela une instance suprême, on ne saurait en douter : une sorte de Comité directeur où les différentes convoitises capitales font entendre et valoir leur voix et leur puissance. "Plaisir", "déplaisir" sont autant de signes venus de cette sphère : ... de même l'acte volontaire. De même les idées.


Somme toute : ce qui devient conscient subit des conditions causales qui nous échappent totalement – la succession de pensées, de sentiments, d'idées dans la conscience n'exprime rien quant au caractère causal de cette succesion : mais il en est ainsi apparemment au suprême degré. C'est en fonction de cette apparence que nous avons fondé toute notre représentation de l'esprit, de la raison, de la logique, etc. (...) ... Et celles-ci derechef projetées dans les choses, derrière les choses !


On tient habituellement la conscience même pour un sensorium global, pour une instance suprême : cependant elle n'est qu'un moyen de la communicabilité : développé dans les rapports et eu égard aux intérêts de ces rapports ... "rapports" au sens également des actions exercées sur nous par le monde extérieur et des réactions nécessaires de notre part : de même de nos actions sur l'extérieur. C'est non pas la direction, mais un organe de direction – "

F. Nietzsche XIII, p. 260

18 avril 2010

Le jeu du s'entredire



Hier erhält Schiller, der Autor der ersten programmatisch-ästhetischen Kritik der Moderne, das letzte Wort. Er entwirft in den Briefen eine Utopie, die vor dem Hintergrund der ins Barbarische abgeglittenen Französichen Revolution der Schönheit und der Kunst eine wahrhaft revolutionäre Rolle zuweist. Diese Utopie zielt freilich nicht auschliliedsslich, wie Habermas zu Recht bemerkt, aus eine ,, Ästhetisierung der Lebensverhältnisse'', sondern auch auf eine ,, Revolutionierung der Verständigungsverhältnisse'' (6, 63). Anschliessend an Kants Kritik der Urteilskraft ist Schiller am Ästhetischen als einer Form der ,, Mitteilung'' und des ,,Gemeinsinns'' interessiert. Im Streit – der häufig wirklich ein Streit ist – über ästhetische Urteile stellt sich nämlich eine ganz eigene Form von Intersubjectivität, Kommunikation und Gemeinsamkeit her.

Schiller beschreibt sie, auch darin Kant folgend, unter dem Leitbegriff des Spiels. Er versteht darunter eine Aktivität, die erstens, dem anthropologischen Ideal seiner Ezpoche folgend, die Ganzheit des Menschen zu realisieren imstande ist (denn der Mensch ,,ist nur da ganz Mensch, wo er spielt''), die sich, zweitens, im Zwischenbereich von Zwang und Zufall abspielt (denn Spiel ist das, was weder zufällig ist noch nötigt), und bei der wir drittens, als Zuschauer oder Akteure, so tun, als ob es ersnt wäre (denn im Spiel erträgt man den Ernst).

Mit den beiden letzten Charakteristika tritt die bekannte Theses in den Vorderhgrund, dass wir im ästhetischen Kontexte experimentell erproben une spielerisch einüben können was in anderen, etwa moralisch-praktischen und politischen Kontexten, dann umgesetzt werden kann, zum Beispiel das paradoxe Verhältnis von Relativismus und Absolutheit. Hier lernt man, nicht auschliesslich, aber wohl am besten, für die eigenen Überzeugungen einzustehen und für sie zu streiten, wiewohl man weiss, dass sie nich fundamentalistich zu begünden sind. Und auch das erste Charakteristikum, das Spiel und Ganzheit zusammenbringt, behält in gewisser Weise seine Funktion. Ein Streit über das, worüber sich nicht streiten lässt, eine Verständigung über das, worüber man sich nicht verständigen kann, etwa über den Kern der eigenen Lebensform, eine Verständigun also über kulturelle und subkulturelle Grenzen hinweg kann nämlich nicht allein auf formalen Elementen der Verständigung, auf einer Verfahrensrationalität beruhen. Vernünftig ist vielmehr die Integration, das heisst nun mit Kant, Schiller und Habermas das Spiel der Vernunft. Der ,,Massstab'' gelingender Versändigung besteht schliesslich nicht auch bei Habermas in einem ,,gleichgewichtigen Zusammenspiel" aller Formen der Vernunft.

Wenn es also um die Beantwortung der Frage geht, ob Kulturkritik heute noch möglich ist, darf man konstatieren : Die Bedeutung von Kulturkritik hat sich verändert. Sie kan ihre fundamlentalkritische Stimme nich mehr erheben, als käme sie von ausserhalb der Moderne und ihren Zumutungen an Kontingenz. Sie kann daher auch keinen unbedarft metaphysischen Standpunkt mehr einnehmen und sich in klassisch-philosophischen Totalitätsgesten ergehen (wiewohl die Meister dieser Gesten populärphilosophisch und feuilletonnistisch beliebt sind). Kulturkritik meint heute weniger eine Kritik der Kultur im Singular als eine Kritik der Kulturen im Plural. Und dazu bedarf sie eines Konzepts der Rechtfertigung, das ohne ästhetischen Momente nicht funktionniert.

Josef Früchtl, extraits de "Ist Kulturkritik heute noch möglich ?" I.P. 1/ 2010

16 février 2010

Créer créer

Créer créer

" Si je trace un dessin sur un morceau de papier, il s'agit d'une action que j'accomplis en me fondant sur l'expérience de ma situation. Mais quelle perception ai-je, ce faisant, de moi-même et quelle est mon intention ? Essayè-je de transmettre quelque chose à quelqu'un (communication) ? De rassembler les éléments de quelque puzzle intérieur (invention) ? De découvrir les propriétés de la forme nouvelle qui se dessine (découverte) ? Suis-je étonné de voir apparaître quelque chose qui n'existait pas encore, ou par le fait que ces lignes n'existaient pas sur le papier avant que je les y trace ? Nous approchons ici l'expérience de la création – et du Rien.
Ce qu'on appelle un poème est peut-être un mélange de communication, d'invention, de découverte, de production et de création. A travers cette complexité d'intentions et de mobiles, un miracle s'est produit. Il y a quelque chose de nouveau sous le soleil ; de l'Etre a émergé le Non-Etre ; une source a jailli d'un rocher.
Sans le miracle, rien ne serait arrivé. Les machines sont déjà en train de devenir plus aptes à communiquer entre elles que les humains. Cette situation a quelque chose de paradoxal : on se soucie de plus en plus de communication et de moins en moins de communiquer ...
Nous ne sommes pas tellement préoccupés de "boucher un trou" dans la théorie ou la connaissance, de remplir un espace vide. Le problème n'est pas de mettre quelque chose dans rien mais de créer quelque chose à partir de rien, ex nihilo. Le Non-Etre, le Rien d'où la création émerge n'est pas un espace vide ou une durée vide.
A ce stade, nous sommes à la limite de ce que le langage peut exprimer, mais nous pouvons suggérer par le langage pourquoi le langage ne peut dire ce qu'il ne peut dire.

(...)

"Le ciel est bleu" signifie littéralement qu'il existe un substantif "ciel" qui est "bleu". Cette séquence sujet-verbe-objet, dans laquelle "est" est la copule unissant "ciel" et "bleu", est une combinaison de sons, de syntaxe, de signes et de symboles dont nous sommes prisonniers et qui nous sépare de (en même temps qu'elle nous renvoie à) cet inexprimable ciel – ciel bleu. Le ciel est bleu et le bleu pas pas le ciel, "ciel" n'est pas "bleu" – mais en disant "le ciel est bleu", nous disons "le ciel est". Le ciel existe et il est bleu. "Est" sert à unir n'importe quelles choses et en même temps ce n'est aucune des choses qu'il unit.
Aucune des choses qui sont réunies par "est" ne peut s'exprimer par "est". "Est" n'est pas ceci, celà, ou autre chose, ou quoi que ce soit, et pourtant "est" est la condition de la possibilité de toute chose. "Est" est cette non-chose, ce rien par quoi toutes les choses sont.
"Est", en tant que non-chose, est ce par quoi toutes les choses sont, et la condition de la possiblité d'être, pour n'importe quoi, c'est que cette chose soit en relation avec ce qu'elle n'est pas. Cela revient à dire que l'essence de l'Etre, de tous les êtres, est la relations qui existe entre elles.

(...)

L'homme crée en se transcendant lui-même par l'acte de se révéler. Mais ce qui crée, l'argile, le pot et le potier, tout cela n'est pas moi : je suis le témoin, le moyen, l'occasion d'un évènement que la chose créée rend évident.
L'homme n'est fondamentalement pas engagé dans la découverte de ce qui est, ni même dans la communication. Ce qu'il fait, c'est permettre à l'Etre d'émerger du Non-Etre.
L'expérience qui consiste à être le moyen réel, le médium d'un processus continu de création, entraîne celui qui la fait au-delà de toute dépression, de tout sentiment de persécution, de toute gloriole, au-delà même du chaos ou du vide, au sein du mystère même de ce continuel passage du Non-Etre à l'Etre. Cette expérience peut être l'occasion de la grande libération que représente le passage de la peur sans objet à la compréhension du fait qu'il n'y a rien à craindre.

(...)

Il y a des hommes qui se sentent appelés à se créer eux-mêmes à partir de rien, leur sentiment profond étant qu'ils ont été mal créés ou créés seulement pour détruire.
S'il n'existe ni signification, ni valeurs, ni source d'aide ou de soutien, l'homme, en tant que créateur, doit alors inventer des significations, des valeurs, tirer de rien sa nourriture et son soutien. Il est un magicien.
Un homme peut effectivement produire quelque chose de nouveau (un poème, un tableau, une sculpture, un système philosophique), penser des idées que personne n'a pensées avant lui, produire des images jamais vues – mais il tirera vraisemblablement peu de profit de sa propre créativité. Le destin qui attend le créateur, après avoir été ignoré, négligé, méprisé, c'est – heureusement ou malheureusement, selon le point de vue où l'on se place – d'être découvert par les non-créateurs.

(...)

Une activité doit être comprise dans les termes de l'expérience d'où elle émerge.

(...)

Nous sommes ici au-delà de toutes les questions, excepté celles de l'Etre, du Non-Etre, de l'incarnation, de la naissance, de la vie et de la mort.
La création ex nihilo a été décrétée impossible même pour Dieu. Mais ce sont les miracles qui nous intéressent : nous devons, comme disait Lorca, entendre la musique des guitares de Braque.
Du point de vue d'un homme aliéné de la source de création, celle-ci naît du désespoir et aboutit à l'échec. Mais un tel homme n'a pas suivi le sentier jusqu'à la fin des temps, la fin de l'espace, la fin de la nuit et la fin de la lumière. Il ne sait pas que c'est là où tout finit que tout commence. "


Ronald D. LAING La politique de l'expérience (1967)